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Dès qu’Aodhan fut parti, Cédric Orléans sombra dans ses pensées. Directeur par intérim de la base de Toronto, il commençait à ressentir une grande lassitude. Toutefois, il ne savait pas très bien si c’étaient les événements mondiaux qui l’oppressaient de la sorte ou la nostalgie de son ancienne vie à Montréal. Depuis la disparition du tiers de la population, le pauvre homme n’avait pas eu beaucoup de temps pour réfléchir Une crise n’attendait pas l’autre. Il lui avait d’abord fallu remplacer les techniciens manquants, surtout dans les postes clés aux Renseignements stratégiques, puis assurer la sécurité du personnel qui tenait à rentrer chez lui à la surface tous les jours. Comme dans toutes les autres villes du monde, les policiers torontois avaient eu du mal à rétablir l’ordre dans les rues.

Il y avait peu de temps que Cédric était retourné à son appartement, situé non loin de l’entrée de la Casa Loma. Toutefois, ce n’était pas la baisse des désordres civils qui avait motivé son geste, mais plutôt son besoin de trouver de la poudre d’or. Thierry Morin lui en avait fourni une bonne quantité, mais ses réserves avaient diminué à vue d’œil. Cédric avait donc dû se mettre lui-même à la recherche de cette substance rare qui lui permettait de conserver son apparence humaine.

Il ne lui avait pas été difficile de trouver des Dracos, car aucun reptilien n’avait suivi les élus lors du Ravissement. Ceux qui ne remplissaient plus de fonctions politiques importantes s’occupaient à présent en menant des activités illégales dans les rues de la ville. Cédric détestait traquer ces monstres, car il lui semblait alors s’abaisser à leur niveau bestial, mais il n’avait pas le choix. S’il voulait continuer son travail pour l’ANGE, il devait se procurer de la poudre d’or. Il avait réussi, à quelques reprises, à en voler dans les repaires de vendeurs de contrebande, mais en petites quantités seulement. Mais, dernièrement, il avait été forcé d’utiliser la manière forte pour survivre.

Cédric avait d’abord été hanté par une grande culpabilité lorsqu’il avait dû trancher la gorge d’un prince qui transportait de la poudre d’or avec l’intention de la vendre à un prix ridiculement élevé à des congénères qui avaient perdu leurs pourvoyeurs dans des rixes entre reptiliens. Puis il s’était répété une centaine de fois en tournant en rond dans son salon qu’il s’agissait de créatures immondes dont le seul but était d’asservir les humains, et il avait sauvagement continué à les attaquer. Au bout de quelques semaines, il avait réussi à se constituer une considérable réserve de poudre.

Tous les jours, dès qu’il avait terminé la lecture de tous les rapports, aussi bien internes qu’externes, Cédric s’informait des progrès de ses anciens agents. Théoriquement, une fois qu’ils atteignaient le statut de « fantômes », ils n’appartenaient plus à la base dont ils étaient issus. Ils relevaient en principe de la division internationale, même si cette dernière ne leur donnait plus aucune directive concernant leur ultime mission.

Cédric justifiait son intérêt pour les activités d’Océane en raison de leur lien familial. Même s’il ne l’avait pas élevée, la jeune femme n’en demeurait pas moins sa fille. Quant à Yannick, c’était surtout par curiosité intellectuelle que le directeur écoutait tous les discours que l’ancien agent prononçait sur la place publique à Jérusalem. Cédric ne croyait pas en Dieu, mais les exhortations du Témoin à résister à la poussée du Mal le fascinaient.

Yannick n’avait certes pas été le plus facile des agents qu’il avait dirigés à Montréal, mais il avait toujours admiré son audace et son aplomb, des qualités qui faisaient cruellement défaut à la plupart des races inférieures de reptiliens. Même s’il était lui-même un Anantas, Cédric avait cru toute sa vie qu’il était un Neterou, né pour servir les Dracos. Ses soudaines fureurs en présence de ses ennemis lui rappelaient cependant la triste vérité : les Anantas ne servaient personne. Ils avaient été créés pour régner sur les autres castes. « Combien de temps encore me contenterai-je d’un poste tout au bas de l’échelle hiérarchique de l’ANGE ? » se demandait de plus en plus souvent Cédric.

Au grand étonnement du directeur, jamais il n’avait vu Océane au premier rang des milliers de personnes qui écoutaient religieusement les paroles de Yannick. Pourtant, la jeune femme se trouvait bel et bien à Jérusalem. Adielle Tobias faisait régulièrement parvenir un court rapport à la base torontoise énumérant les déplacements de l’ex-agente. Cédric ne comprenait pas non plus pourquoi Océane n’avait pas encore accompli sa mission, elle qui avait l’habitude de s’élancer sans réfléchir dans les situations les plus dangereuses.

« Ce ne sera plus pareil sans eux lorsque je réintégrerai ma base de Montréal », songea Cédric. Cindy et Vincent appartenaient désormais à la division internationale, car ils avaient été déclarés morts lors de l’explosion de l’ancienne place forte québécoise. Mithri pourrait sans doute utiliser Cindy ailleurs dans le monde, mais le cas de Vincent était plus problématique. Même s’il n’avait pas été tué par deux fois par des démons, jamais il n’aurait accepté de travailler sur le terrain. Depuis que Cédric le connaissait, soit depuis sa sortie d’Alert Bay, le jeune savant avait toujours préféré œuvrer dans l’ombre.

— MONSIEUR ORLEANS, VOUS AVEZ UN APPEL DE MADAME ZACHAKIAH, fit soudainement la voix de l’ordinateur.

— Accepté, répondit le directeur en chassant ses pensées obsédantes.

Le visage de la grande dame de l’ANGE remplaça les actualités sur l’écran encastré dans le mur.

— Bonjour, Cédric.

— Bonjour, Mithri.

— Je t’apporte enfin un petit rayon de soleil dans l’obscurité de notre quotidien.

— La base est enfin prête ? devina-t-il sans afficher le moindre enthousiasme.

— C’est exact. Dans quelques semaines, tu pourras enfin rentrer chez toi. Mais je t’avertis, la situation à Montréal n’est pas plus reluisante qu’à Toronto.

— Je sais.

— Christopher t’enverra une ou deux recrues, et je laisse le soin à Kevin de te trouver au moins un vétéran, car tu n’en as plus aucun.

— Avec votre permission, Mithri, j’aimerais garder l’agent Loup Blanc.

— Je verrai ce que je peux faire.

— Qui dirigera la base de Toronto après mon départ ?

— Kevin m’a chaudement recommandé l’un de nos agents européens. Je suis certaine que tu as mis toute la base en ordre depuis que tu la diriges et qu’il n’aura aucun mal à te remplacer.

— J’ai fait de mon mieux. Merci, Mithri.

— Attends d’être de retour à Montréal pour me remercier.

La dirigeante de la division internationale mit fin à la conversation, et l’ordinateur fit disparaître son visage sur l’écran. Cédric était parfaitement au courant de ce qui se passait dans la ville où il avait longtemps travaillé. Le crime y était aussi présent qu’ailleurs, mais ce problème était du ressort de la police, pas de l’ANGE.

— Ordinateur, que pouvez-vous me dire sur la nouvelle base de Montréal ? demanda le directeur en s’enfonçant dans son fauteuil.

— LES PLANS SONT MAINTENANT DISPONIBLES, MONSIEUR ORLEANS.

— S’ils diffèrent de ceux de toutes les autres bases de l’ANGE, j’aimerais les voir.

— LA NOUVELLE BASE A EN EFFET ETE CONSTRUITE SELON LES SCHEMAS APPROUVES PAR LA HAUTE DIRECTION EN 1959.

— Apprenez-moi donc quelque chose que je ne sais pas.

— MONSIEUR KEVIN LUCAS VIENT D'ARRIVER A LA PORTE DE VOTRE BUREAU.

Cédric sursauta.

— Kevin ? Ici ?

— DESIREZ-VOUS UN VISUEL, MONSIEUR ?

— Cette question ne s’adressait pas à vous.

— DESIREZ-VOUS LE LAISSER ENTRER ?

— Évidemment.

Les portes métalliques coulissèrent en chuintant. Le directeur canadien mit le pied dans le bureau, aussitôt suivi par un homme que Cédric ne connaissait pas. L’étranger devait avoir une soixantaine d’années, car ses cheveux blonds étaient parsemés de mèches argentées, mais son corps athlétique ne trahissait pas son âge.

— Bonjour, Cédric, le salua jovialement Kevin Lucas, je suis vraiment satisfait du travail que tu as accompli ces derniers mois.

Le directeur torontois n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche.

— je te présente Kenneth Boyden, continua Lucas, apparemment surexcité.

— Vous pouvez m’appeler Ken, précisa le visiteur en tendant la main à Cédric, qui la serra volontiers.

Le contact de la paume de Boyden déclencha un indéchiffrable signal dans le système nerveux de l’Anantas. « Il n’est pas humain », comprit aussitôt Cédric. N’ayant pas reçu le même entraînement que Thierry Morin, il lui était impossible de savoir de quelle race était vraiment cet individu. Le sourire qui s’étira sur les lèvres de Boyden fit comprendre au directeur torontois que ce dernier avait ressenti la même chose que lui.

— Ken te remplacera à Toronto lorsqu’il sera temps pour toi de retourner à Montréal, ce qui ne saurait tarder, expliqua Lucas qui, lui, n’avait rien remarqué. Il est impressionné par le travail que réussit à abattre ton équipe réduite.

— Ce sont les véritables héros de ces temps difficiles, articula enfin Cédric.

— Je dois le ramener avec moi à Ottawa cet après-midi, mais je veux bien vous laisser faire davantage connaissance tandis que je passe un appel à monsieur Ekdahl.

— Oui, bien sûr, agréa Cédric.

Kevin Lucas tapota amicalement le dos de son nouveau directeur et quitta le bureau. Afin de détendre l’atmosphère, Boyden prit place dans l’un des deux fauteuils devant le bureau, indiquant à Cédric qu’il n’était pas pressé de lui succéder.

— Qu’aimeriez-vous savoir à mon sujet ? demanda le visiteur avec un fort accent britannique.

— D’où venez-vous ? fit aussitôt Cédric en restant figé sur place.

— J’arrive tout droit de Londres où j’ai agi comme agent, puis comme adjoint au directeur.

« Adjoint ? » s’étonna le directeur torontois. Il n’avait jamais entendu parler d’un tel poste au sein de l’ANGE.

— Avant cela, continua Boyden, j’ai travaillé en Russie, en Afrique du Sud et en France. Monsieur Lucas me croit maintenant prêt à diriger ma propre base.

— Je crains que votre premier geste ne soit de vous trouver de nouveaux agents.

— On m’a mis au courant de vos déboires.

— Déboires ? répéta Cédric, offensé.

— Je ne considère pas que le passage de l’état d’agent actif à celui d’agent fantôme soit une promotion. Il nous fait perdre de bons espions.

Utilisant ses index, Boyden fit signe à son collègue qu’il désirait lui parler hors de la surveillance de l’ordinateur central. Cédric retourna donc derrière sa table de travail et pianota un code sur le clavier de son ordinateur personnel.

— C’est fait, annonça-t-il au Britannique.

— Ne jouons pas au chat et à la souris, voulez-vous ? Votre réaction tout à l’heure m’a tout de suite indiqué que vous êtes une créature très spéciale.

— Pourriez-vous être plus vague ?

« Je commence à parler comme Océane », déplora intérieurement Cédric.

— Vous n’êtes pas humain, laissa tomber Boyden. Je l’ai tout de suite senti.

— C’est votre formation d’agent en Russie, en Afrique du Sud et en France qui vous a enseigné à dépister les créatures très spéciales ?

— C’est quelque chose que j’ai appris à faire bien avant d’être recruté par l’ANGE.

Cédric prit place derrière son bureau et joignit ses paumes, appuyant le bout de ses index sur sa lèvre inférieure, geste qu’il faisait généralement lorsqu’il était très contrarié. Il n’avait aucune envie de révéler quoi que ce soit à cet étranger avant de savoir qui il était réellement. Comprenant que son interlocuteur attendait de plus amples informations, le Britannique s’avança plus loin dans ses révélations.

— Je suis un varan, avoua-t-il.

— C’est impossible…, laissa échapper Cédric dans un murmure.

Des années auparavant, avant la naissance d’Océane, sa tête avait été mise à prix et des Nagas, lancés à ses trousses…

— Le fait que vous sachiez ce qu’est un varan finit de me convaincre que vous êtes reptilien, poursuivit l’aspirant directeur sur un ton de provocation. Toutefois, je n’arrive pas à définir votre race.

Les varans étaient des exécuteurs de Dracos et d’Anantas. Si Boyden venait à découvrir que son prédécesseur faisait partie de la deuxième famille, il aurait tôt fait de s’en prendre à lui. La mort inexpliquée de Michael Korsakoff figurait déjà au dossier de Cédric. S’il devait tuer le nouveau directeur de la base de Toronto, même en légitime défense, la sentence de Mithri Zachariah serait impitoyable.

— Ce que je sais des reptiliens, je l’ai appris dans notre base de données, répondit finalement Cédric.

— J’ai déjà décortiqué ces informations, monsieur Orléans. On n’y parle pas des varans. Où avez-vous entendu ce nom et pourquoi semblez-vous surpris que j’en sois un ?

— Celui qui a enrichi nos connaissances sur les reptiliens est un Naga.

— Ici ? Laissez-moi en douter.

— Il opérait surtout en Europe avant d’être envoyé à Montréal, puis à Toronto.

Le visage de Boyden devint grave. « Il connaît Morin », comprit Cédric.

— Où est-il, maintenant ?

— Comment voulez-vous que je le sache ? D’ailleurs, si vous faites partie de la même organisation que lui, vous êtes certainement mieux placé que moi pour le retrouver.

— Vous mentez, monsieur Orléans. Pourquoi ?

— La vie m’a appris à ne pas faire confiance au premier venu. Je n’ai aucune preuve que vous êtes ce que vous prétendez, sauf votre parole.

— Vous me mettez au défi ?

— Prouvez-moi hors de tout doute que vous êtes bien un traqueur, et je vous dirai tout ce que vous voulez savoir.

Les yeux clairs de Boyden fixaient cruellement Cédric. « Comme ceux d’un serpent…» observa ce dernier. Il aurait donné cher pour deviner ses pensées. « Pourquoi ne change-t-il pas d’apparence devant moi ? se demanda Cédric. Cela aurait tôt fait de me convaincre. » Il ignorait beaucoup de choses au sujet de ses ancêtres ophidiens, mais il savait au moins que la peau des Nagas était d’un vert très pâle.

La petite lampe au-dessus de la porte d’entrée se mit à clignoter furieusement. Cédric en profita pour mettre fin à cette discussion qui risquait de mal tourner. Il pianota rapidement un nouveau code sur son clavier.

— MONSIEUR LUCAS DEMANDE A VOUS VOIR, MONSIEUR ORLEANS.

— Faites-le entrer.

Le directeur canadien entra dans le bureau, armé de sa bonne humeur habituelle.

— J’espère que vous avez eu le temps de fraterniser, car je dois partir immédiatement, annonça-t-il aux deux hommes. Monsieur Ekdahl m’a demandé de m’arrêter à son bureau avant de partir pour Ottawa.

— Nous aurons certainement une autre occasion de bavarder, répliqua Boyden en se levant.

Il tendit la main à Cédric, mais ce dernier se contenta de le saluer de la tête. Dès que les deux hommes furent sortis du bureau, le directeur torontois suivit leurs pas sur l’écran mural. Une fois qu’ils eurent quitté sa base, il s’adressa à l’ordinateur.

— Affichez-moi tout ce que vous pouvez trouver sur Kenneth Boyden.

— CETTE INFORMATION EST CONFIDENTIELLE, MONSIEUR ORLEANS. VOUS DEVEZ OBTENIR L'AUTORISATION DE LA DIVISION INTERNATIONALE POUR Y ACCEDER.

— Pourquoi son dossier est-il inaccessible ?

— CETTE INFORMATION EST CONFIDENTIELLE, MONSIEUR…

Cédric abattit durement son poing sur la table de travail.

— DESIREZ-VOUS COMMUNIQUER AVEC MADAME ZACHARIAH ?

— Non !

Cédric décrocha son manteau de la patère, l’enfila et s’engouffra dans son ascenseur personnel. Il avait besoin de respirer un peu d’air frais pour contenir ses émotions.

 

Codex Angelicus
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